La genèse
Au début des années 80, la galerie En Attendant les Barbares se lance dans l’édition de deux designers débutants : Elizabeth Garouste et Mattia Bonetti. Ils prennent le nom de Garouste & Bonetti. Très vite, leur culture et leur imaginaire leur confèrent le triple statut de designers, décorateurs et artistes. Iconoclastes, Garouste & Bonetti définissent un nouveau style, d’une inspiration éclectique soutenue par une réalisation de haut niveau. Leurs premières créations déterminent les bases d’un courant décoratif connu sous le nom de « style barbare ». L’une des caractéristiques de ce style est de faire appel à des artisans d’art et d’évoquer de multiples références esthétiques et historiques.
La consécration
Cette approche non exhaustive permet à Garouste & Bonetti de renouveller sans cesse leur inspiration. Les matériaux utilisés sont multiples : fer forgé, fer forgé, bronze, bois, métal patiné, feuille d’or, parchemin. La poésie de leur démarche se reflète dans le choix des noms de les pièces. Lampe Lune, lampe Masque, Boite Couronne, canapé Topkapi, table Isis. Ils revendiquent l’influence des Arts Décoratifs français, de Jean Michel Frank à Jean Royère.
Car Garouste & Bonetti réintroduisent la notion de sur-mesure. Ils imaginent le concept de lignes déclinables: « Fourches», «Olympiade », « Feuilles ». Chaque design peut s’adapter à différents types de mobilier. Par exemple, une console se transforme en table basse, un guéridon, en table de salle à manger etc.. Les finitions, patine de fer ou de bronze, choix du bois ou de la feuille d’or, sont également choisies lors de chaque réalisation.
La séparation
Au début des années 2000, Garouste & Bonetti se séparent, laissant à En Attendant les Barbares le soin de continuer d’éditer leurs créations. Leur catalogue est impressionnant. Certaines œuvres ont été exposées dans des musées. Citons le Centre Pompidou, Musée des Arts Décoratifs (MAD), Victoria & Albert Museum (Londres), Grand Hornu (Bruxelles), Fondation Cartier, Musée Guggenheim (New York).
Aujourd’hui, leur cote auprès des collectionneurs en fait des classiques recherchés par les collectionneurs. Certains résultats atteignent des sommets, comme un fauteuil en fer forgé, vendu chez Sotheby’s 445 000 euros.
Parmi les artisans d’art, signalons Pierre Basse, ex-ferronnier de Diego Giacometti, qui travaille en exclusivité pour la galerie. Pierre Basse a développé un savoir-faire inégalable, avec un travail spécifique de fer battu à la main. En 1985, Il a contribué à l’élaboration d’éléments décoratifs de Diego Giacometti pour le Musée Picasso.
Pierre Basse effectue également des expertises de pièces de Diego Giacometti pour de prestigieuses maisons de ventes aux enchères, telles Christie’s et Sotheby’s. Toujours à mi-chemin entre art, design, et art décoratif, la galerie fait appel au bronzier Bocquel, qui est le fondeur de Gérard Garouste, César, et Arman.
La suite de l’histoire
Après la séparation d’Elizabeth Garouste et de Mattia Bonetti, la galerie continue de les éditer, chacun séparément. D’abord Elizabeth Garouste, à qui elle a consacré deux expositions personnelles. Puis Mattia Bonetti, qui a développé une brillante carrière internationale. Eric Schmitt fait partie également des premiers designers. Il est fidèle à la galerie qui lui avait consacré une première exposition personnelle en 1990. Lors de l’exposition hommage « Diego Giacometti Forever », il aborde le domaine de la sculpture. Il est également très présent dans l’exposition « Fantasmagories », en 2022.
La galerie édite d’autres talents du design à qui elle donne l’occasion de découvrir le savoir-faire de ses artisans d’exception. Au fil du temps, Andrée Putman, Eric Jourdan (Prix ArtParis Design), Christian Ghion, Matt Sindall et Arik Lévy ont rejoint la galerie.
En 2009, lors d’une exposition personnelle, Andrée Putman, amie de longue date d’Agnès Kentish, présente « les Boites d’Andrée ». Considérant ce thème sous un angle large, elle développe et extrapole le concept de la boîte. Et passe avec aisance de la table de chevet au plumier, de l’ébène de Macassar ; au bronze ou à la laque.
Entre créations sur-mesure et séries limitées, la galerie En Attendant les Barbares abolit la frontière entre art décoratif, art et design. L’objectif est de créer des rencontres entre artisans et designers, essence même du design de collection ou « collectible design »..
En 2022, le MAD (Musée des Arts Décoratifs) a sélectionné plusieurs pièces de la galerie pour son exposition « Années 80 ». Certaines de ces pièces sont toujours produites, comme la lampe Lune de Garouste & Bonetti.
Ce parcours est retracé dans le livre d’Anne Bony, paru aux Editions du Regard : « Quatre Décennies de Design ».
Paru fin 2022, ce livre a fait l’objet d’une seconde édition.